Du point de vue des enfants, on est tous adult(ist)es.

Aujourd’hui en France, en 2020, L’adulte est toujours perçu comme adultiste par les enfants. Que l’adulte soit militant nVEO ou pas, l’enfant le percevra comme adultiste. Parce que c’est ce qu’il voit partout, tous les jours : des adultes qui décident.
Son cerveau, les réactions qu’il adopte pour se protéger face à l’insécurité sont associés à : Adultes = Décident pour enfants ; savent mieux que les enfants.
C’est ce qu’on voit PARTOUT, c’est ancré.
On participe tous à ça, qu’on le veuille ou non, on est tous perçu comme adultistes.


Faire preuve de positivisme (« mais moi j’ai adopté la posture nVEO, mon intention est autre ») ce n’est pas voir la réalité en face, c’est se déresponsabiliser, c’est se déculpabiliser, c’est nier le problème, ce n’est pas être acteur.
La réalité EST que les enfants vivent l’adultisme tous les jours. Peu importe qu’il y ait 10 000 militants nVEO en France. Ça ne règle pas le problème qu’ont les enfants.
Il y a certains enfants pour lesquels c’est « moins pire » que d’autres.
« Moins pire » ça ne veut pas dire zéro. Et ça, peu importe la volonté des parents. C’est au delà de ça. La VEO est partout. La posture adultiste est partout.
Je suis moi-même ENCORE un parent en déconditionnement. Ce serait prétentieux (et complètement faux) de m’exclure du panier des parents VEO.
Je cheminerais jusqu’à ma mort et j’aurais toujours des choses à améliorer avec le rapport que j’ai avec mon enfant intérieur et avec les enfants que je côtoierais toute ma vie.
Tant que les enfants que je croiserais sur mon chemin subiront cet adultisme permanent, je serais toujours perçue comme adultiste.
Une anecdote pour illustrer :
j’étais avec mon conjoint Nolwennig et mes enfants dans une aire de jeux qui était composée d’un seul tourniquet. Le reste c’était des trucs d’escalade qui sont beaucoup trop haut (1m50) pour mes enfants de 5 et 3 ans.
Mes enfants étaient donc venus spécialement dans ce jeu pour ce tourniquet.
Mais il y avait 2 ados dedans. Elles étaient juste assises pour discuter. Elles ne tournaient pas dedans.
Du coup, mes enfants me disent d’aller demander si elles ont bientôt fini.
Je me suis approchée tout doucement avec un petit sourire gêné et j’ai demandé, j’ai essayé de formuler en CNV :
« Je vois que vous êtes assises pour discuter ici, Mes enfants m’ont dit avoir besoin du tourniquet, et m’ont demandé de vous le demander, ils n’osaient pas. Est-ce qu’ils peuvent l’avoir ou est-ce que vous en avez encore besoin ? »
Et elles n’ont pas attendu que je dise d’autres choses, elles se sont levées immédiatement -déjà leur corps a changé de posture pendant les 20 mètres où je marchais vers elles… c’est dire!-, elles ont bafouillé devant l’adulte (moi), elles ont baissé les yeux et sont parties sans une phrase, pensant ne pas avoir d’autres choix,… s’asseoir sur un banc, 30 mètres plus loin.
Cette scène m’a profondément gênée. J’aurais aimé avoir la force et le courage d’exprimer mon intention, et d’avoir le temps de dire « si vous ne voulez pas, on le comprendra aisément, on accueillera l’éventuelle frustration de nos enfants et on trouvera une alternative pour eux, pour leur besoin de tourner sur eux-mêmes ».
J’aurais aussi aimer avoir le temps de me relier à leurs besoins à elles : vraiment chercher une stratégie commune, au lieu d’imposer mon privilège d’adulte, j’aurais pu proposer « votre besoin est d’être assise, de discuter, d’être dans un endroit serré, de tourner ? je propose le banc que j’ai vu un peu plus loin, ou plutôt un abris-bus juste à coté, etc » j’aurais aimé qu’il y ait un réel échange avec communication de chacun des besoins… une solution gagnant-gagnant, prenant en compte le besoin de tous.
J’ai fait l’erreur de ne pas préciser ce qu’il se passerait en moi (l’adulte) si elles refuseraient. Je n’ai pas exprimé mon intention clairement. Elles ont été obligés de déduire mon intention et l’ont fait avec ce qu’elles connaissent des adultes.
Et si elles avaient refusé de se déplacer ? elles ont probablement pensé que je risquerais de dire : « nan mais oh, c’est pour tout le monde le jeu, nous sommes venu de loin, vous devriez prêter! -et autres arguments adultistes- »
Sauf que moi JAMAIS je ne dirais ça. Et je suis vraiment OK pour qu’un enfant ou un ado suive ses besoins plutôt que de se conforter aux attentes des adultes. Mais c’est pas écrit sur mon front en fait. Je suis un adulte donc dans la tête des enfants je suis forcément adultiste : ce qui signifie que je risquais de crier sur elles ou d’être méprisante etc.
Donc même si pendant ces 30 secondes j’ai la posture la plus adaptée selon moi, bah… l’environnement dans lequel ces enfants se trouvent, ne change pas, lui.
On ne peut pas l’ignorer, ça.
On ne peut pas ignorer le ressenti des victimes, et les causes.
Et si j’avais balancé un « #notAll » dans ce parc à ces deux ados, je serais venue minimiser et banaliser l’adultisme qu’elles subissent depuis 13 ou 14 ans 😥
Oui OK Moi je ne suis « pas comme ça » mais à quoi ça sert que je dise « nan mais je comprends pas pourquoi elles ont pris peur, elles m’ont inclu dans les adultes VEO, alors que j’ai fait des efforts, c’est injuste, je me définis comme une personne respectueuse et consciente et non comme « le club des adultes VEO ». Bah que je le veuille ou non : j’appartiens bien à ce club, DU POINT DE VUE DE L’ENFANT, du point de vue des victimes.
Et si je veux que ça change, je dois plutôt toujours penser à décrire mon intention, me concentrer sur les enfants et accueillir ce que ressentent les victimes de toutes sortes d’oppression et proposer des ressources pour informer les personnes non-informées.
Alors voilà, en parallèle on milite, on fixe des règles aux parents (des lois de non violence), parce qu’on n’a pas d’autres moyens d’agir dans les foyers.
Bouger les choses, manifester, créer des lois… et puis agir sur le plan personnel, l’exemplarité, le bénévolat, en faire son propre métier… Voilà ce qui m’apparaît pour le moment pour changer le monde, changer les intentions des adultes,… du point de vue des enfants.

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